LE QUATRIÈME CONGRÈS FRANÇAIS DE CRIMINOLOGIE a cherché à concilier les exigences de la défense sociale et les impératifs de la réadaptation des délinquants
Strasbourg, 15 octobre. – La criminologie est une science encore trop neuve et impliquant la collaboration de disciplines trop diverses pour avoir réellement défini sa voie. C’est sans doute ce qu’a fait apparaître le quatrième congrès français de criminologie, qui vient de s’achever à Strasbourg, après trois journées de travaux, suivis avec une assiduité parfois proche de la passion, n’excluant pas la controverse. Parmi les quelque cent cinquante congressistes réunissant psychiatres, universitaires, éducateurs, assistantes sociales, visiteurs de prison, on a pu distinguer les enthousiastes des prudents à la lumière des rapports généraux, des communications et de leur discussion, mais on a applaudi la phrase du Dr Yves Roumajon, déclarant en substance que, si l’on peut encore discuter des méthodes de traitement du délinquant (sujet du congrès), il ne s’agit pas d’une utopie. » Il nous faudra beaucoup pousser à la roue, a dit en effet M. Roumajon, mais la marche est irréversible. «
Cette proclamation n’était pas gratuite, et certains n’ont pas manqué d’y voir une discrète mais ferme réplique à un texte peu connu publié dans la Revue pénitentiaire et de droit pénal d’avril-juin 1963 sous le titre : » La doctrine de la Ve République en matière de répression. » Cet article n’est, en effet, pas autre chose que le compte rendu d’une conférence prononcée le 28 mars dernier par M. Jean Foyer, ministre de la justice, devant les auditeurs du Centre national d’études judiciaires, et qui est notre école de magistrature. On y lit ceci : » Une singulière doctrine issue du positivisme italien prône un système déconcertant dans lequel l’infraction se dissimule derrière les délinquants, le délinquant disparait derrière le malade. On invente la césure du procès pénal, le prononcé de la peine étant séparé de la déclaration de culpabilité… D’après cette école, tout honnête homme devient un criminel qui s’ignore… « , et plus loin : » La conséquence directe de tels systèmes est l’affaiblissement de la répression. D’autre part, les traitements psychiatriques pour, guérir les délinquants et les réadapter à la vie sociale sont si compliqués qu’ils nécessiteraient des moyens matériels énormes. Il faut sans doute tenir compte des connaissances acquises par la science, mais jusqu’à ce jour les travaux des criminologues ne paraissent pas avoir apporté des certitudes indiscutables. »
Et M. Foyer d’exposer aux futurs magistrats, en présence des principaux magistrats actuels, que » la considération abusive de la personne du délinquant aboutit à énerver la répression par la recherche excessive des antécédents et des mobiles qui amènent à excuser tous les actes « , qu’elle » tend à l’application d’une thérapeutique discutable à la suite d’un diagnostic incertain « , bref qu' » il est nécessaire de conserver le caractère juridique du droit criminel, le principe de la légalité devant continuer de dominer le droit pénal « .
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