Favoriser et accompagner en justice: la sortie du silence sur les « violences de l’intime »

Laurence Begon-Bordreuil

Revue « Enfances & psy » 96, 8 juin 2023

Extrait:

Le phénomène actuel de « libération de la parole » sur les violences sexuelles et les violences intrafamiliales est un fait de société majeur auquel nous assistons non seulement en France mais à une échelle internationale. Certains, comme la sociologue Irène Théry (2022, p. 16), l’envisagent même à juste titre, comme « l’un des plus puissants mouvements de transformation des sociétés en ce premier quart du xxie siècle ».
Les livres de témoignages de victimes, les tweets, les podcasts, les émissions de radio et de télévision se multiplient de façon exponentielle, tout particulièrement depuis 2017, dans le sillage de la vague #MeeToo.
En creux, ces révélations nous parlent de la sortie progressive du silence pour de nombreuses victimes, femmes, hommes, enfants, anciens enfants devenus adultes, et de la découverte de l’« immense continent caché du harcèlement et des violences sexuelles » (ibid., p. 15), masqué non pas par la distance des terres émergées entre elles mais par un voile opaque d’enfouissement, de honte, de culpabilité et de secret.
D’autant que le silence n’est pas le seul fait de la personne qui a subi les faits. La « silenciation » est également analysée comme organisée/souhaitée, plus ou moins inconsciemment, par le cercle familial proche (Dussy, 2021), parfois par les institutions encadrantes 1 ou plus généralement par la surdité de la société qui n’a entendu que progressivement monter cette vague en son sein. Un « emboîtement de silences, telles des poupées russes », selon la très jolie image employée par la journaliste Charlotte Pudlwoski dans son podcast « Ou peut-être une nuit ». Face à ce déferlement de révélations, la justice est mise en cause pour sa lenteur, voire son inaction, pour son mode d’administration de la preuve jugée trop défavorable aux victimes, ou pour ses préjugés, ce qui a eu pour résultat, parfois problématique, un dérivatif vers un « tribunal médiatique » considéré comme seul à même de pointer la gravité et l’ampleur du phénomène.

 

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